Debout devant son armoire, il fouille hâtivement. On arrivait en fin d'après-midi, les cours étaient ou allaient se terminer, mais il n'était pas encore l'heure pour la plupart des jeunes de rejoindre leurs chambres. Il ne faisait pas trop mauvais aujourd'hui, sans doute allaient-ils trainer dehors malgré le soleil déclinant, ou bien dans la bibliothèque ou la salle commune pour terminer les devoirs en groupe pour les plus sérieux. Qu'ils fassent partis des premiers ou des seconds, ces deux camarades de chambre restaient pour l'instant absents. Tant mieux.

" Bon sang, où est-ce que... ah ! "

Il repousse la pile de jeans et attrape le petit flacon qu'il avait planqué derrière. Il aurait sans doute put le mettre à l'abri dans le tiroir de la commode fermé à clé s'il ne voulait pas qu'on le trouve, mais... n'est-ce pas dans les endroits protégés et verrouillés que l'on a envie de fouiller en premier?
Il ouvre le flacon d'un geste fébrile et précipité, renversant deux petites pilules au creux de sa paume qu'il se hâte d'avaler avant de remettre le flacon en place. Hé oh ! Stop, vous pensez de travers si vous criez déjà au drogué ! Enfin, ça reste une question de point de vue. Du moins, tout ça est arrivé légalement en sa possession. Mais c'est vrai, certains se shootent aux médocs... En prendre plus que la dose prescrite pouvait avoir des effets et des conséquences similaires.

L'après-midi avait été affreusement longue. Il était essoufflé sans aucune raison et son thorax se comprimait douloureusement à chaque respiration. Une rechute? Sans doute, cela devenait un peu plus régulier ses derniers mois, même si son état de santé restait un cas particulier pour les médecins. Évidemment, ces derniers ne pouvaient pas savoir qu'il avait absorbé le pouvoir de guérison de son frère cadet! Des gosses avec des pouvoirs... on était pas dans X-men ! Et pourtant.. c'était bien une réalité, et ce petit écart, cette "magie" dont il avait bénéficié un temps rendait le diagnostic médical plus difficile à comprendre et à établir. Quoiqu'il en soit, on lui avait tout de même fourni des anti-douleurs, Dieu soit loué !

" Bordel... "

Il referma son armoire et recula jusqu'à son lit sur lequel il se laissa tomber de tout son long. Allongé sur le dos à fixer le plafond, il soupira avant de fermer ses yeux.
Cela faisait quelques jours maintenant qu'il était arrivé à Rédemption et cela ne faisait aucun doute que cet endroit était bourré de personnes possédant des capacités paranormales, son don de Détection était titillé en permanence à tel point que ça en devenait presque pénible. Parmi tout ces para, il devait bien y en avoir au moins un ou deux qui possédait le pouvoir de guérison! Il lui suffirait alors d'absorber un peu de ce pouvoir pour se sentir mieux... Juste un peu...

Il rouvrit lentement ses paupières pour fixer le plafond d'un air absent. Pour l'instant il devrait se contenter des pilules; encore quelques minutes et leur effet devrait se faire ressentir pleinement, déjà sa cage thoracique et ses poumons mis à mal se détendaient, la sensation étouffante d'oppression disparaissant peu à peu.

Après une entrée remarquée au pensionnat, un peu de calme ne pouvait pas faire de m.. HEY !?!!
Se redressant sur ses coudes, il dévisagea la rouquine qui venait d'entrer dans la chambre sans autre forme de procédé. Il arqua un sourcil, la détaillant d'un air suspicieux, se demandant bien ce qu'elle fichait ici? A moins qu'elle ne soit venue voir l'un des deux absents?

" Mais j't'en pris, fais comme chez toi surtout. "

Non mais vraiment.. et frapper aux portes, on ne lui avait pas appris? Elle n'avait pas vraiment l'air d'avoir besoin de son invitation dans tout les cas.

Drôle de phénomène que voilà, riant insouciante alors qu'elle venait de pénétrer par effraction dans le dortoir - et plus encore dans la chambre - des garçons. A n'en pas douter, il était quasi certain que dans un endroit comme Rédemption il devait exister l'une de ses règles à la con comme quoi il est interdit de visiter le dortoir de l'autre sexe. Hé oh, minute, c'est l'hôpital qui se fout de la charité! Sans grande hésitation, Stan serait probablement l'un des premiers à aller trainer du côté du dortoir des filles. Bouh, vilain garçon.

Il se redressa pour se retrouver assis sur le bord de son lit, observant toujours la jeune fille qui a présent s'avançait pour se présenter. Une jupe courte qui laissait voir - ou plutôt deviner sous ses collants verts - ses longues jambes, un haut qui laissait place à l'imagination et une bouille de jeune fille qui - pour une raison inconnue - lui semblait tout droit sortie d'un conte pour enfant ! Si ce n'était ce petit sourire mutin qui l'aurait plus fait pencher pour un lutin qu'une fée.
Héééé.... par sur que la demoiselle apprécierait la comparaison ! Il était légèrement en train de divaguer là, non ? Mettons ça sur le contre-coup des médicaments qu'il venait de prendre... Oui, faisons comme ça.

" Mélissandre, hein ? "

L'observant toujours d'un air curieux, il lui rendit un sourire avant que ses yeux ne suivent le même chemin que ceux de la rouquine, jetant un coup d'œil circulaire à la pièce. Pour sur, il aurait ranger un peu s'il avait su qu'il aurait de la visite ! Enfin... peut-être... ça restait une chambre de garçons! Et puis, ça pourrait être bien pire, là ça restait très correct!
Il se releva, et fourra d'un coup de pied plus ou moins discret les affaires qui trainaient par terre sous son lit.

" Enchanté Méli, moi c'est Stan. Je peux faire quelque chose pour toi ? "

Quelqu'un de plus poli aurait demander " ça te dérange pas que je t'appelle Méli? " mais pour lui le surnom était déjà adopté, et oui, comme ça en moins de dix secondes c'était décidé. Est-ce qu'il se doutait que cette fille n'était pas élève et n'avait rien à faire là? Pas le moins du monde! En même temps, il était arrivé ici il n'y a que quelques jours et il ne connaissait pas le visage de tout le pensionnaires de Rédemption par cœur !

Bim! Pouvoir de détection qui se met en route. Cette fille possède un don. A vrai dire... Il n'en était plus vraiment surpris... Il se demandait même s'il 'existait pas une seule personne dans le coin qui n'en possédait pas un! Et comme à chaque fois, sa curiosité et son imagination se mettent en marche. Quel genre de don pouvait-elle bien posséder? Enfin, pour l'instant il était plus curieux sur le pourquoi de la présence d'une jolie fille dans sa chambre.

Un léger sourire taquin et amusé effleura ses lèvres alors qu'il la détaillait sans gêne - sans pour autant être trop lourd, passer pour un gros pervers, c'est pas son truc, merci - avant d'ajouter.

" Tu ne te serais pas perdue tout de même ? "

Alors alors jolie lutine, d'où est-ce qu'on vient comme ça?

Et la voilà qui prenait ses aises! Après tout, elle avait bien raison et cela le fit sourire. Et bien oui après tout, ne lui avait-il pas dis de faire comme chez elle? Mélissandre l'avait prit au mot.
Il haussa légèrement un sourcil en voyant le regard qu'elle lui lançait, finissant par s'asseoir lui aussi à même le sol, en face d'elle, le dos appuyé contre son lit. Il resta muet tout comme elle, observant ses yeux verts qui semblaient plongés dans un ailleurs qu'elle seule pouvait voir. A quoi donc pouvait-elle bien songer?

" Je vois, une rencontre du au hasard... Plutôt sympa comme principe. "

Il lui sourit, la fixant avec un certain amusement. Quelle curieuse fille... Sa façon de faire était originale, elle sortait de l'ordinaire! Ça lui plaisait bien, même si elle n'avait pas vraiment choisi le bon moment. Il inspira profondément en silence. Ses poumons n'était plus douloureux et son essoufflement s'était dissipé, c'était déjà ça, les médicaments étaient efficaces, mais il se sentait fatigué - ce qu'il ne laissa pas paraitre - et il rit légèrement en désignant d'un geste circulaire la chambre vide.

" Si on m'avait dit que des jolies filles tombaient comme ça dans le coin, je ne l'aurait surement pas cru ! "

Il replia une jambe sous lui, laissant l'autre étendue, et croisa ses bras sur son torse. Mélissandre était une curieuse fille et un fille curieuse.
Il se renfrogna légèrement lorsqu'elle aborda aussi directement le thème de leurs dons surnaturels, devenant plus méfiant. Si on y réfléchissait, cela n'avait rien de bizarre. Tout le monde ici semblait en posséder, il semblait donc plutôt évident que les gens soient au courant! Mais Stan n'était ici que depuis quelques jours et dans le monde "normal" avoir ce genre de pouvoir ferait de vous une bête de foire, un genre de mutant, quelqu'un de pas "normal" assurément! Mais ce fut sa dernière question qui le fit tilter.

Sur l'instant, il n'avait pas bien saisit sa question, il répondit à la première d'une voie calme en prenant son temps sans avoir l'air trop lent non plus, juste histoire de se donner quelques secondes pour réfléchir.

" Je suis en terminal, en alternance... "

Il aurait pu continuer en lui raconter qu'il était censé être l'assistant d'un prof lors de ses cours dans le cadre de cette alternance - prof qu'il n'avait pas encore rencontré d'ailleurs - mais il s'arrêta là. Il n'aimait pas des masses parler de lui et puis cette fille l'intriguait trop.
La scrutant comme s'il lui était possible de dénicher ses secrets rien qu'en la fixant, il fini par le lui demander carrément.

" ... De quoi est-ce que tu parles ? "

Est-ce qu'elle aussi possédait un don similaire au sien? Capable de ressentir le pouvoir des autres? Mais alors pourquoi aurait-elle perçu son don de détection et pas celui d'absorption?
A la voir le fixer comme ça sans ciller, il eu l'impression qu'il pourrait jouer aux imbéciles indéfiniment qu'elle n'en démordrait pas. La jolie rouquine semblait sûre d'elle et trouver ça tout à fait normal. Rien d'étonnant à avoir des capacités pareilles? Ah bon, très bien. Autant jouer cartes sur table dans ce cas. Tant mieux, Stan n'aimait pas prendre son temps, et lui aussi était curieux.

" J'ai bien deux dons. Je pourrais t'en parler si tu me parles aussi du tien. "

Il releva sa main pour se saisir le menton, l'observant toujours avec un mélange d'amusement et de curiosité intense. Le principe du donnant-donnant, "parle et je parlerais", enfin, c'était sans savoir que pour Mélissandre, parler était superflu, il lui suffisait d'aller chercher directement ce qu'elle voulait savoir dans la tête des gens. C'était de la triche !

Mélissandre... Il n'avait pas fallut plus de deux trois mots échangés pour qu'elle se mette totalement à l'aise et ne commence à fouiner partout. Stan en venait même à se dire que si elle n'avait pas commencé à mettre la chambre sans dessus dessous dès le départ, c'était simplement par pur politesse. Encore heureux qu'il n'ai rien cacher! Elle cherche quoi là? Des magazines pornos planqués sous les draps? Ouuh, la vilaine coquine! En espérant que ces deux co-chambreurs n'aient pas des choses à se reprocher, ahah, ils allaient lui en vouloir de la laisser fouiller comme ça.~

Rien à cacher... On a tous des choses à se reprocher, mais dans l'immédiat, il gardait un œil sur elle; il n'y avait rien dans sa chambre qui pourrait le trahir pour quoique ce soit. Hormis peut-être la boite de médicaments qu'il gardait au fond de son placard derrière sa pile de pantalons, mais encore, il fallait y connaitre quelque chose pour faire le rapprochement entre ces comprimés et ce dont il était atteint. Voilà une chose qu'il ne voudrait pas qu'on ébruite, il veillerait donc que la Miss Curiosité ne fouille pas trop non plus.

" ... Tu ne voudrais pas me fouiller tant que tu y es ? "

L'image fugace de la jeune fille vêtue d'un uniforme de police en train de lui faire une fouille au corps lui traversa l'esprit, ce qui lui tira un sourire amusé, d'autant plus devant l'air absorbé qu'avait Méli en allant voir d'un côté à l'autre de la chambre s'il y avait des choses intéressantes à voir.

Quand elle s'arrêta enfin -une vraie hyperactive celle-là!- pour répondre à sa proposition, il la fixa à son tour... son sourire se figeant, et son corps se raidissant en entendant la réponse.

...

... Quoi, quoi, quoi ??? Elle lit dans les pensées ?! C'est une blague ! Depuis le début... ?
Évidemment que c'était possible ! Il lui suffirait d'un geste pour vérifier...

" Tu lis dans les pensées ? Tout le temps ? Merde, tu le fais là?! Bordel !! Ça se fait pas ! Ah merde, putain le con... ! "

Une flopée de mots fort peu polis lui échappèrent - le choc de se rendre compte de ce que cela signifiait. Depuis le début elle lisait dans ses pensées? Et bah mon vieux... cela voulait dire qu'elle avait "entendu" toutes ces remarques depuis le début ! .. Encore heureux qu'il ai pas songé à des trucs plus cochons comme... HOLA ! Stop! C'est pas le moment, si ça se trouve, elle était encore en train de lire dans sa tête!

Mélissandre le sortit de ses interrogations intérieures en le ramenant au sujet principal. Elle lui avait répondu, c'était à son tour maintenant. Il lui lança un regard méfiant et un rien suspicieux. Elle venait de nommer son second don, n'avait-elle donc vraiment aucune idée de ce qu'il en retournait réellement?

" ... Tout ce que tu peux faire, je peux le faire aussi. "

Il s'était redressé et avancé un peu en disant ça. Il leva son bras droit, et tendit sa main vers elle avec un air soudain plus sérieux.

" Il me suffit d'un simple contact.. "

Il effleura sa joue du bout des doigts, une légère caresse, et... n'absorba rien du tout. Il avait depuis longtemps prit le parti d'ignorer ce que pouvait penser les autres, même lorsqu'ils l'exprimaient haut et fort, alors il n'allait pas commencer maintenant à lire directement dans leurs pensées! Qui plus est... absorber un pouvoir était en effet très simple pour lui, le contrôler pourrait s'avérer plus difficile. Mélissandre était née avec cette capacité, qui sait ce qui se passerait s'il devenait télépathe d'un seul coup aussi brusquement?

La toisant, en pleine réflexion, les sourcils légèrement froncés, il croisa se bras.

" Comment je fais pour savoir si tu es en train de lire dans mes pensées ou pas? "

La fixant toujours, il fit une tentative.

** Et la vie privée dans tout ça? Tu es en perpétuelle violation de l'intimité des gens! **

Savoir que vos secrets les plus intimes pouvaient être découverts à n'importe quel moment était plutôt désagréable... Il suffirait d'y penser une seconde pour qu'elle soit au courant!
...
AH BON SANG ! Pourquoi faut-il toujours que lorsqu'on se dit qu'il ne faut pas penser à un truc, on ne pense plus qu'à ça??!! Non non non non non non non non non non non, ah ! L'imaginer toute nue ! Allez, hop, ça vide la tête et on ne pense plus à rien ! Hey, ça marche plutôt bien... oh, les jolies courbes que voilà. ♥ Quoi? Si elle lisait toujours ses pensées? Et bien, il ne fait que penser, c'est de sa faute si elle est toujours là, dans sa tête, alors qu'elle ne s'en prenne qu'à elle !

Le pouvoir de télépathie. C'est certain qu'il devait avoir ses avantages. Rien qu'à l'école par exemple, il devait être difficile de l'avoir avec un devoir surprise! Et puis de toute manière, il lui suffirait d'aller piocher les infos dans la tête du prof pour avoir les solutions. Enfin, ça c'était sans savoir que Mélissandre ne faisait absolument pas partie du pensionnat. En dehors des cours, elle pouvait éviter les ennuis en esquivant les personnes louches, fuir ceux qui fomentent des plans tordus ou les mauvais dragueurs aux pensées pas nettes. Quoique sur ce dernier point, la rouquine semblait plutôt amusée de lire en lui les songes quelques peu lubriques qu'il avait put avoir à son égard. Le prenait-elle aussi bien parce qu'elle savait déjà qu'il n'était pas le genre de garçon à forcer qui que ce soit, à être grande gueule, parfois blessant, mais pas foncièrement méchant? Quoique mauvais, il pouvait l'être parfois. C'était assez déstabilisant de se dire que la personne en face de vous -que vous ne connaissez absolument pas- pouvait vous connaitre mieux que personne d'autre. Il ne devait pas être facile de la surprendre.
Pas de fête organisée en cachette, pas de visite d'amis à l'improviste, la spontanéité perd son sens, tout comme les gens dont elle doit pouvoir deviner assez rapidement les intentions si elle les côtoient trop souvent. Stan comprenait mieux comment elle avait atterrit ici, dans sa chambre. Mélissandre se créait ses propres surprises en allant chercher de la nouveauté au hasard. Du moins c'est comme ça qu'il le percevait.

Il lui sourit d'un air narquois en la fixant, lui rétorquant sur le ton de la taquinerie.

" Qu'est-ce qui te dit que tu n'es pas déjà tarée? Il sourit en coin avant d'adopter l'air du type convaincu de ce qu'il dit, un rien sur-joué sans doute, Stan avait tendance à ne rien prendre au sérieux. En apparence du moins. Tu m'as l'air d'avoir un bon petit grain de folie! "

Entendre les pensées de tout le monde sans pouvoir stopper ça... Il était bien content de ne pas avoir absorber un pouvoir pareil tient ! Déjà que ça le gonflait quand tout le monde parlait en même temps... Il était difficile de s'imaginer la situation de Mélissandre en n'étant pas à sa place, mais quelque chose lui disait que s'il n'était pas devenu dingue avec autant de voix dans la tête, il se serait soit tirer une balle, soit il aurait essayer de buter tout le monde!
...
Bon, c'était un peu extrémiste comme pensée là, fallait avouer, mais il n'avait pas tout à fait envie de tester pour voir si ça se passerait comme ça ou non. Peut-être qu'il irait tout simplement s'isoler dans un coin perdu en jouant aux ermites ?

" Tu ne dois pas comprendre grand chose quand tu es entourée de plein de monde... "

Ce n'était pas vraiment une question à proprement parler, Stan s'interrogeait seulement à voix haute. Terminant sa phrase d'un haussement d'épaules, il redevint silencieux en l'observant.

" ...avec moi c'est difficile de garder une vie privée. Mais je sais très bien faire semblant de ne rien savoir... " avait-elle dit. Elle faisait semblant? Cela signifiait-il qu'elle savait déjà? Pour les médicaments au fond de son placard auxquels il avait pensé tandis qu'elle farfouillait un peu partout dans la chambre un peu plus tôt, pour la maladie, son frère, sa faute, la mort, la chasse.. Toutes ses pensées venaient de débarquées en même temps dans un capharnaüm silencieux, se bousculant en tout sens dans sa tête, peu compréhensibles pour une personne qui n'était pas au courant de toute l'histoire. Il se raidit un instant en se rendant compte que si "Non, elle ne faisait pas semblait et ne savait rien à ce sujet" maintenant c'était certainement le cas. Ah, bravo pour la discrétion Stan !

Reprenant la parole en répondant à ses propres interrogations tout comme à la remarque de la jeune demoiselle sur ses pensées déplacées, il lui sourit d'un air qu'il voulait boudeur et désinvolte qui cachait son léger malaise, vis à vis de Méli qui mettait les pieds -involontairement ou non- là où il ne fallait pas, mais surtout vis à vis de toutes ses pensées qui le ramenait à de mauvais souvenirs, de mauvaises choses.

" J'ai jamais appris à cacher mes pensées. Jusqu'à présent j'en avais pas besoin ! Il fit une petite moue enfantine et boudeuse, avant que ses lèvres ne se tordent en un sourire plus espiègle digne d'un garnement qui venait de faire un mauvais coup. Je m'en fais pas, je compte sur toi pour préserver l'image de garçon pur et innocent qui flotte au dessus de ma tête ! "

Il mima un air pseudo-angélique pour accompagner ses dires. Assurément, il n'avait pas la réputation du garçon sage. Et ce, même s'il venait d'arriver au pensionnat de Rédemption il y a un peu moins de deux semaines ! Il faut dire que Stan avait enchainé les catastrophes... Le pire, c'est qu'il n'en avait élaboré que la moitié !

Au moins, elle semblait le trouver drôle, c'est le moins que l'on puisse dire à l'entendre rire comme ça! Un son agréable, même si c'était à ses dépends. Hey, elle était en train de se fiche de lui là? Son petit grain de folie qui s'exprime sans doute! Baah, c'était rien ça, enfin, il aurait put se sentir vexer mais ça lui passait à quinze milles lieux au dessus! Et puis, venant de Méli - c'est étrange à dire puisqu'il ne la connaissait pas - mais ça ne le dérangeait pas. Ce qui le dérangeait en revanche c'était plutôt...

Au moment où ses pensées s'embrouillaient, elle était devenue soudain silencieuse. Plus de rire qui résonne dans la pièce et cet air sérieux et concentré qu'elle a en le fixant. Ça, ça le dérangeait. Car il savait. Il savait que cela signifiait qu'elle avait tout "entendu".

Il se raidit en la voyant se diriger sans la moindre hésitation vers son placard. Il fit un pas vers elle, et lorsqu'elle stoppa son geste, il s'immobilisa à son tour.
Il aurait put nier, dire qu'elle avait mal compris, mais c'était inutile, elle l'avait lu directement dans son esprit, et qui plus est... elle devait venir de suivre le cheminement de ses pensées à l'instant même. Non, il n'était vraiment pas préparé pour faire face à une télépathe. Sa première réaction fut plutôt sèche, comme l'option mensonge était indisponible, il rétorqua sur la défensive - et un poil agressif, du fait de cette intrusion dans ce qu'il considérait comme ses secrets.

" Qu'est-ce que ça peut te faire ? "

S'il avait été un chien, son échine se serait hérissée et on l'aurait entendu grogner à cet instant. Mais il se contenta d'un regard froid et... blessé? Ou quelque chose comme ça. Non, vraiment, il n'aimait pas ça. S'il était grande gueule et qu'il se la jouait à la façon du type qui se la raconte et qui se fout de tout, c'est parce qu'il l'avait choisi. Il aurait put au contraire être un garçon sage et studieux. Mais si l'on devait se rappeler de lui, se serait d'un type qui s'éclate et qui profite, tant pis si ça devait passer par la case "chieur" ou "emmerdeur". Il ne voulait qu'on lui colle l'étiquette du "pauvre petit garçon malade". Non. Il allait bien! Bien! Bordel de merde!

Tournant le dos à la rouquine, il alla ramasser quelques affaires qui trainaient ici et là pour ranger un peu. Plus pour s'occuper que pour réellement ranger à vrai dire.

" Pourquoi tu demandes? .. Tu le sais déjà de toute façon... "

Il était né dans une famille aux antécédents médicaux peu enviables. Et voilà, c'était tout. C'est con à dire comme ça, pas vrai? On lui avait diagnostiquer une forte probabilité de développé un cancer des poumons, et, enfin, les médecins... ils n'avaient plus rien compris après l'incident avec son frère, ils n'avaient jamais vus un truc pareil.
Un léger sourire maussade effleura les lèvres de l'adolescent en train de ranger. Ouais, pauvres médecins complètement paumés, c'est sur qu'ils ne devaient pas savoir que des personnes comme "eux" existaient, des personnes comme toutes celles qui vivaient ici, au sein de Rédemption. Alors quand il avait absorber le pouvoir de guérison de son frère cadet, forcément, ça avait faussé tout leurs examens. Du coup, ne sachant plus vraiment où la maladie en était, ils s'étaient contenté de ça, de ces médocs, en attendant de voir la suite. Autrement dit, en attendant que ça se dégrade de nouveau.

" Des anti-douleurs.. ce sont des anti-douleurs. "

Après avoir rangé plus ou moins correctement la pile d'affaires qu'il avait ramassé, il s'assit au bord de son lit, ses épaules s'affaissant légèrement tandis qu'un soupire silencieux lui échappait, et releva son regard vers la curieuse intrusive. Lui aussi était curieux, il pourrait comprendre, mais là, c'était trop.

" Satisfaite ? "

Il était amère, et la fatigue sembla le submerger de nouveau d'un bloc. Il grimaça et coupa court à d'éventuelles questions.

" Et non. J'ai pas envie d'en parler. "

L'ambiance bonne enfant était retombée d'un coup et l'atmosphère semblait s'être alourdi en conséquence. Est-ce qu'il pensait à ce que pouvait ressentir Mélissandre à cet instant? Pas le moins du monde. Peut-être plus tard, mais pas maintenant. Est-ce qu'il s'inquiète du fait qu'elle pourrait le répéter? Non plus. Ce sont aux huit dernières années qu'il songe, huit ans de silence qui venait de partir en fumée en quelques minutes à peine. ** Pardon Maman.. ** Assis au bord de son lit, il tourne sa main gauche, paume face à lui, et son regard bleu-gris se pose sur la croix ancrée dans la chair de son poignet. Une cicatrice pour un souvenir, non, un rappel. ** Est-ce que ça aurait changé quelque chose si je t'avais dis... ** S'il avait avoué sa faute, la situation aurait-elle été différente? S'il n'avait pas été un gamin effrayé par la bêtise qu'il venait de faire et qu'il avait tout expliqué, est-ce que les médecins aurait pu faire quelque chose? Non, la question est toujours d'actualité. S'il leur dit, est-ce qu'alors ils trouveraient la solution? Rien n'est moins sur, pourtant, il aurait au moins du essayer. Qu'est-ce que ça lui aurait couter? Qu'est-ce que ça lui couterait? A son frère, cela avait déjà couter 8 ans. Huit longues années... ** Pardon Rei.. Pardon... **
Plutôt que d'assumer, il avait laissé son frère croupir dans le coma dont il était responsable toutes ses années. Il n'était plus le gamin de 11 ans de l'époque, et pourtant il continuait de vivre sa petite vie tranquille sans se soucier de rien.

Dans le fond, c'est peut-être bien ce qu'il reprochait le plus à Mélissandre et son intrusion. Lui faire penser à tout ça. Mettre à jour le fait qu'il n'était qu'un putain d'égoïste qui ne pensait qu'à sa pomme. Il le savait bien, mais il s'efforçait chaque jour de l'oublier, et ça marchait plutôt bien.
Ses doigts se refermèrent en poing et tout son avant-bras trembla légèrement sous la force avec laquelle il le serrait.

" Aucune limite hein... "

Les yeux rivés sur son poing, il les ferma une seconde avant de les rouvrir en tendant sa main droite devant lui, semblant absorbé dans la contemplation de celle-ci.

" J'absorbe le pouvoir des personnes par simple contact. Mais si je venais à te toucher trop longtemps, tu tomberais dans un profond coma; un peu plus longtemps encore et tu mourrais certainement. "

Mélissandre, une jolie rouquine bien sympa, un peu trop fouineuse sur les bords sans doute. Il devrait se coltiner ses pouvoirs quelques temps, une ou deux années s'il s'en referait à son expérience. Et puis ce serait fini. Alors qu'elle serait plongée dans le noir pour une durée inconnue. Peut-être qu'elle en sortirait plus tôt? Elle était presque une adulte. Les adultes sont moins fragiles que les enfants. Ou peut-être pas. Peut-être que comme son petit frère, il l'enverrait "dormir" pour un temps indéfini. Rien qu'en la touchant. Et lui? Hey! Il deviendrait surement dingue avec toutes ses voix dans sa tête! Ça serait un juste retour des choses remarques.
C'est sur, elle ne pourrait plus en parler à personne comme ça.

Il passe ses mains meurtrières sur son visage et le frotte sans ménagement. Il raconte n'importe quoi.. et il se fiche de ce qu'elle peut bien entendre, il voudrait les envoyer se faire voir tout ces gens qui lui donnent de "bons conseils"! Ils ont raison la plupart du temps, mais ce n'est pas ce qu'il a besoin d'entendre.

" Va t'en. S'il te plait... laisse moi tranquille. " ** Je suis désolé... **

Qu'on lui foute la paix, il veut... non, il ne le veut pas, mais il a besoin de rester seul. Son pouls accélère, il craque, il se sent mal. Qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour gueuler à s'en briser la voix tout ce qu'il a sur le cœur. Mais une fois encore il est sans doute trop lâche. Il a une grande gueule, mais courageux, il ne l'a jamais été. Pas sur ce plan là.

Il n'a plus envie de parler, il ne veut plus penser à tout ça. Il n'a plus envie de la voir, elle ou tout les autres. Non, c'est lui qui va sortir, il a besoin de prendre l'air. Oui, c'est ça. Un grand bol d'air frais, ça lui ferait du bien. En moto, à toute vitesse, ce serait l'idéal. Mais il n'a pas de moto ici.

Consciemment ou non, il reporte toutes ses pensées sur ce qu'il pouvait faire, ça contenait le reste, et repoussait le moment fatidique du débordement. Ça aurait pu marcher. Ça a marché durant quelques secondes du moins avant qu'il n'entende ce :

" Non. "

Net et incisif. Il se raidit et relève son visage vers la télépathe. Qu'est-ce qu'elle voulait encore ? Elle n'en avait pas assez fait ?! Et la voilà qui s'avance pour venir s'installer juste sous son nez, en tailleur sur le sol de sa chambre.

Il cille un instant, durant une seconde sa tête se vide, le temps que la requête formuler par la rouquine percute son esprit embrumé. Elle lui demande... de l'aide ? A lui ? Lui qui vient de lui déballer sa faute, son incapacité à assumer, sa lâcheté face à la réalité. A lui qui refuse son aide à son propre frère par simple égoïsme de garder sa petite vie tranquille de glandeur? Elle était la première personne à qui il racontait ça - involontairement, certes, mais là n'est pas le sujet - et maintenant elle lui demandait de faire ce qu'il ne pouvait pas faire pour son frère, pour elle ?! Elle qu'il ne connaissait que depuis quelques minutes ?! ELLE SE FOUTAIT DE SA GUEULE !!

Ses muscles se tendent brutalement et sa mâchoire se crispe. La violente pulsion de lui retourner un gifle lui traverse l'esprit comme un éclair violent. Il est tellement plus facile de céder à la colère, ça permet d'oublier tout le reste, on se laisse juste emporter par cette dominante, et c'est tellement moins douloureux que les regrets et les angoisses, moins prise de tête aussi. Du moins, sur le coup. C'est après, à la prise de conscience de ce qu'on vient de faire que ça se gate. Car oui. Le coup est parti tout seul. Il l'a giflé et il regrette son geste à peine après que ses doigts aient quitté la joue pâle de Mélissandre. Déjà la peau rougit. Il n'y est pas allé de main morte, pas à fond non plus, mais assez pour que sa peau laiteuse prenne cette couleur coquelicot.

Son geste reste suspendu. C'est la première fois que ça lui arrive. Il a déjà cogné, mais c'était dans des bagarres, des trucs de garçons, qui se battent pour un oui ou pour un non, juste parce qu'ils ont besoin de se défouler parfois. Mais jamais il n'avait levé la main sur quelqu'un gratuitement comme il venait de le faire. Elle l'avait poussé à bout mais il n'aurait pas du. Non, il n'était pas ce genre de type violent, il ne faisait pas parti de ceux qui battent leur copine parce qu'elle a fait un truc de travers, il n'était pas comme ça !

" Je... "

C'est comme si toute la colère, la frustration, l'angoisse, la peur et tout ce qui va avec c'était envolé avec ce geste. Il ne restait plus que l'hébétude devant ce qu'il venait de faire.
Il se laissa glisser du lit et tomba à genoux devant la jeune fille toujours assise en tailleur, tendant ses mains pour saisir son visage en coupe et constater les dégâts.

" Mélissandre.. Je... je suis désolé..j'voulais pas... ça te fais mal ? Attends, j'vais te chercher un gant frais ! "

Il se relève d'un bond sans lui laisser le temps de placer quoique ce soit, un peu perdu et déboussolé. Il attrape un gant propre dans la salle de bain, et fait couler de l'eau fraiche dessus. L'essorant grossièrement avant de le rapporter à la rouquine. Peut-être qu'il en fait trop, peut-être que ce n'est pas si douloureux que ça, mais il fallait qu'il fasse quelque chose. Comment il avait pu en arriver là ?

Il s'appuie dos au mur, et se laisse glisser le long de celui-ci jusqu'à se retrouver assis par terre, un peu à l'écart de la jeune fille, sans être à l'opposé non plus. Il rabache des excuses encore, il ne voulait pas faire ça ! Mais il l'avait fait...

Il passe une main sur son visage, lentement, et se masse le front, et finalement murmure.

" Ça marche pas comme ça... "

Il se redresse un peu, appuyant son crâne contre le mur et lève son visage vers le plafond.

" Ton pouvoir, tu peux le voir comme un liquide...Et toi, tu es un récipient rempli de ce liquide... "

Il ferme les yeux et inspire, poursuivant. Mélissandre avait le droit de savoir. Peut-être, aussi, qu'il essayait de se faire pardonner ?

" Moi, je suis un récipient vide. Quand je touche quelqu'un avec un don, c'est comme si je faisais passer ce liquide de son récipient au mien. Plus le contact dure longtemps, plus il y a de liquide transvasé d'un récipient à l'autre. "

Il expire longuement. C'était comme ça. Enfin, c'est comme ça qu'il percevait son pouvoir, en apprenant par lui-même. Le problème, c'est qu'il ne connaissait pas les limites de chaque "récipient". Certains pouvaient se briser avant que tout leur pouvoir ne soit absorbé.

" Ensuite, le pouvoir revient à son propriétaire d'origine avec le temps. Comme si... le liquide que j'ai réussi à récupérer dans mon récipient s'évaporait petit à petit, en continue. "

Il tourna son visage vers Mélissandre, l'observant silencieusement avant de doucement secouer sa tête.

" Je ne peux pas faire disparaitre ton pouvoir. A moins de tout absorber, mais ça serait trop dangereux. Je peux juste.. l'amoindrir ? "

Non, il ne pouvait pas "supprimer" un pouvoir. Mais en le disant, il se rendit compte qu'ici, quelqu'un le pouvait. Ses sourcils se froncèrent alors que cette évidence sonnait à sa porte.

" Mais West le peut. Il a le pouvoir d'annihiler tout les autres. "

Le professeur des cours "spéciaux", le prof dont il était l'assistant dans le cadre de son alternance. Lui, il pouvait faire ça. Faire taire un don. C'était plutôt pratique puisque ces cours servaient à apprendre à maitriser ces dons !

Elle était restée silencieuse tout du long. Elle n'avait pas crié, n'avait pas cherché à rendre les coups, elle ne s'était pas enfuie non plus. Elle était juste restée là, comme figée sous le choc, et il avait pu voir ses yeux se mouiller et les larmes finalement couler sur ses joues pâles, toujours en silence.

Toujours assis contre le mur, il reporta son regard vers le plafond après lui avoir couler un regard en coin. Voir dans cet état cette fille qui s'était pointée un peu plus tôt à l'improviste et qui avait accueilli sa surprise de la trouver là par des grands éclats de rire et l'avait laissé songer à toutes ces choses plus ou moins déplacées en gardant un large sourire aux lèvres, ça... lui faisait mal quelque part. Dire que les premières minutes de cette rencontre, elle lui avait semblé incarner la joie de vivre, et maintenant elle pleurait à cause de lui. Peut-être pas directement à cause de lui s'il comprends ce qu'elle vient de dire. Mais il avait déclenché un souvenir douloureux chez elle, comme elle avait renflouer une prise de conscience non moins douloureuse chez lui.

Il ferme ses yeux, et cogne silencieusement l'arrière de son crâne contre le mur derrière lui, une fois, deux fois... puis il s'arrête, inspire et expire profondément, histoire de se vider la tête, et surtout de se décider à faire quelque chose.

Lorsqu'il rouvre ses paupières une nouvelle fois, il se lève dans la foulée, va attraper un mouchoir propre et revient s'accroupir en face de sa camarade de galère psychologique.

" Allez, t'es tellement plus mignonne quand tu souris.. "

Tamponnant ses joues mouillées avec le mouchoir en papier, il lui adressa un sourire, amical et peut-être un peu taquin aussi. Refoulant une fois de plus toutes les pensées à propos de son frère dans un coin de sa tête, peut-être que ça l'arrangeait de se s'occuper de Mélissandre, encore un acte égoïste de sa part pour reporter à plus tard - ou à jamais - ce à quoi il devait faire face.

Ses sourcils se froncèrent légèrement et son regard se fit plus dur tandis qu'il essuyait les larmes, ses pupilles rivées songeusement sur ce qu'il faisait. Ses doigts s'immobilisèrent lentement sur la joue rougie et ses iris bleu-gris se relevèrent sur les bleus hétérochromiques de la télépathe.

" On peut essayer. ... Si tu veux. "

Il avait rencontré quelques Para en Nouvelle-Zélande - bien moins qu'à Birdsall, c'était évident, mais tout de même - et il n'avait pas résisté à la tentation de tester son pouvoir, ni à la curiosité d'essayer les leurs - rarement en leur demandant leur avis d'ailleurs. Enfin bref, il savait approximativement combien de temps durait les effets. En fait, il avait remarqué que ça dépendait des personnes, mais... c'est comme... s'il y avait un coche, une sorte de déclic lorsqu'il absorbait un pouvoir et qui lui disait " tu viens de passer un seuil! " comme si son récipient était gradué en quelque sorte. Le dernier coche, celui de la limite avant débordement, il avait plutôt pas intérêt à le rater. Il arrêterait là les métaphores, tout ça pour dire que...

" Je pense que t'entendrais toujours des pensées, mais seulement les plus "puissantes", et ça ne durerait que quelques jours. Trois je dirais, en sachant que durant ses trois jours, tu le récupérera tout de même progressivement.. "

C'était quoi trois jours? Méli était bien née avec, c'était pas des voix qui allaient lui faire peur !
.. Ouais, enfin.. ça ne l'emballait pas des masses... Les premières 24h seraient surement infernales, ensuite le nombre de pensées qu'il capterait irait en décroissant, jusqu'à disparaitre totalement le troisième jour selon ses expériences précédentes.

" Qu'est-ce que t'en penses ?! "

Le ton est plus enjoué et son sourire se fait plus tendre et complice devant ce visage blasé aux yeux mouillés. Il appuie son index sur le bout du nez de la rouquine avec un léger rictus, en oubliant que cette dernière peut lire en lui sa réticence à cette expérimentation.

Il la voit, ils se regardent, et pourtant c'est comme s'ils n'étaient pas là. Tout semble l'indifférer à cet instant. Du moins jusqu'à ce qu'il en vienne à ce qui l'intéressait vraiment, le sujet qui avait amené à cette gifle et tout ces mauvais songes. C'est quand il cède à ses désirs qu'un sourire - faible mais bien présent - consens enfin à se dessiner sur ce visage devenu subitement inexpressif après cette vague de peine.

Elle ne réfléchit pas longtemps à sa proposition, mais y avait-il vraiment à réfléchir devant une opportunité pareille ? Elle répondit un simple " Oui. " une réponse claire et sans hésitation.

Il lui rend alors son sourire, plus appuyé de son côté, et ses doigts toujours immobiles quittent la joue pâle pour saisir soudainement sa nuque et l'attirer vers lui. Un geste rapide et brute, sur une impulsion, vite, avant qu'il ne se dégonfle et change d'avis.

Une sorte de décharge électrique lui traverse le corps, sa bouche se presse contre la sienne et sa peau frissonne, un afflux indéchiffrable passant d'un corps à l'autre. Légère tout d'abord, la sensation devient plus forte. Il n'y a pas de mots pour définir « ça », l'énergie qui le parcourt, ce pouvoir qui se déverse dans ses veines, ses muscles, et chaque partie de son corps, lui donnant un souffle nouveau. Une expérience déjà vécue, mais qui varie à chaque fois, exquise et délicieuse, allez chercher se pouvoir et l'extirper, l'attirer à soit, et le faire sien, l'intégrer, se fondre avec, devenir plus fort en se l'appropriant.
Absorber un pouvoir c'est un peu comme... être devant un délicieux gâteau, notre préféré, notre pêché mignon, on a beau avoir l'estomac rempli, on est trop gourmand et on veut en reprendre encore, le manger en entier, rien que pour nous ! Il y a une expression pour ça « Avoir les yeux plus gros que le ventre », mais si manger trop de gâteau risque de vous donner des maux de ventre, le danger est à un autre degré dans la situation présente. Ils étaient au courant tout les deux, et ils ont pris la décision de tenter la chose tout de même. A lui maintenant de se contrôler et d'arrêter ça à temps.

Si dur, si difficile, plus il en absorbe, plus il en veut. D'un coup, tout aussi soudain qu'il avait commencé, l'échange se rompt. Il tremble un instant, puis cligne des yeux et repose son regard sur elle, un peu abasourdi et haletant de ce transfert de pouvoir électrisant.
Pourquoi par un baiser ? Pour rien, une simple pulsion, du Stan tout craché. Hey ! Elle ne l'avait pas vu venir celui-là ? Il faut dire qu'il ne réfléchissait pas toujours avant d'agir... Il venait surement d'en faire la preuve encore une fois.

Surprise, étonnement, inquiétude, prise de conscience, espoir, joie. Brouillon. Cacophonie. Anarchiques. Que des bribes. Des mélanges. Incohérence. Chevauchement. Voix. Cris. Pensées. Tout s'entrecroise, s'entrechoque, il ne comprends pas tout, ça vient comme par vague, il s'était douté qu'il entendrait les pensées de Mélissandre, mais d'autres voix se superposaient à la sienne. Ses voisins de chambre ? Il ne comprenait rien, un brouahah indéchiffrable ! Il n'était pas habitué à ça, il ne s'y était pas préparé, il n'avait pas imaginé les choses ainsi. La télépathie, il s'en faisait l'image que l'on en a dans les films, mais dans ceux-là, un personnage avait une pensée, et lui, absorbeur de pouvoirs, il ne méprisait absolument pas ce dont et toutes ses choses qui pouvaient traverser la tête d'une personne résonnait dans son crâne en un dialogue bruyant duquel il était totalement exclu. Si bien qu'il ne compris que la jolie rouquine lui avait adressé la parole de vive voix parmi tout ce qu'il "entendait" que lorsqu'elle lui sauta au cou pour le remercier.

Il l'attrapa et referma ses bras sur elle pour lui frotter le dos instinctivement tandis qu'il prenait conscience des paroles qu'elle venait de prononcer.

" Ouais.. c'est... ouais. "

Il lui fit un vague sourire, peinant à se concentrer pour un dialogue un tant soit peu construit. Bon sang ! Comment elle faisait pour supporter ça ?! C'est pas possible, elle avait du développer une tolérance, ou bien la capacité d'occulter une partie de ce qu'elle captait !
Le fixant intensément, il essayait fit une tentative, essayant de se concentrer sur elle. Les pensées de Méli étaient les plus fortes qu'il percevait, normal, puisqu'elle était la seule personne présente dans la pièce avec lui, mais des "songes parasites" venait le brouiller depuis le couloir, les autres chambres ou dieu sais où ! Et même les pensées de la rouquine ne lui parvenait pas aussi clairement qu'il l'avait escompter, c'était plus... des mots, des sensations.. est-ce que c'était avec l'expérience que l'on arrivait à comprendre clairement les pensées d'autrui ? Ou c'était juste lui qui merdait avec son pouvoir ?! Bon, doucement, ça ne faisait qu'une minute à peine, tout ça allait se calmer... il fallait l'espérer oui, parce que sinon....

Il fronce les sourcils et grimace.

" Bon sang, mais c'est toujours comme ça ?! "

Il grogne et ronchonne, rien de très inhabituel en soit, c'était même signe qu'il allait plutôt bien !
Sa main se posa sur la tête rousse et la frotta, amical.

" Bien sur que ça a marché ! Hey ! Tu me prends pour qui ?! Tu me fais pas confiance ou quoi? "

Il haussa ses sourcils, l'air presque vexé. Presque, parce qu'en fait il s'amuse ! Enfin, pour le moment il fait le malin, mais au bout d'un jour avec toutes ses pensées étrangères à sa personne qui fourmille dans sa tête, ce serait sans doute une autre paire de manches. Alors autant en profiter hein ! Il ricane et lui attrape le bout du nez, le lui pinçant entre son pouce et son index, tout en lui lançant un regard, les sourcils froncés et un ton légèrement boudeur.

" J'espère bien que t'entends presque plus rien, avec tout le raffut qu'ils font dans ma tête ! "

Nouveau sourire, plus tendre, amusé et ennuyé cette fois, relâchant son nez pour lui appuyé sur la joue, lui rétorquant plus narquoisement en voyant ses joues se mouiller de nouveau.

" Et arrêtes un peu de pleurer, tu vas me faire une sale réputation auprès des filles. "

Elle était heureuse, c'est le moins que l'on puisse dire. Au fur et à mesure qu'elle prenait conscience de sa toute nouvelle condition - bien qu'éphémère - il pouvait capter sa joie grandissante et toutes ces choses qu'elle envisageait de faire. Il y eu un moment d'inquiétude aussi, pour lui ? Et qui était ce Dorian ?! Un prof ?!

Stan avait beau avoir la capacité de lire dans les pensées dès à présent, il ne faisait que capter les pensées directes et ne possédait pas la vivacité d'esprit de la rouquine à poser les bonnes questions pour amener l'autre à penser à ce qui l'intéressait. Il ne savait pas exemple toujours pas qu'en réalité, Méli n'avait rien à faire ici puisqu'elle n'était même pas une élève de Rédemption !

C'est toujours un peu abasourdi par tout ça qu'il laissa Mélissandre lui balancer toutes ses recommandations. Elle se demandait s'il lui en voulait, hein ? Pourquoi ? Le cerveau de la télépathe - temporairement HS pour cause d'absorption du pouvoir - était en pleine effervescence. Il entrapercevait rues bondées de Birdsall, séchage de cours et un Isaac complètement inconnu au bataillon.

Il baragouina quelques trucs quand elle lui sauta encore au cou pour le remercier, et la regarda sortir sans trop avoir réalisé qu'elle était partie. On pouvait dire que Mélissandre était une fille enthousiaste. C'est le moins que l'on puisse dire. Quant à lui... il restait un peu sur le cul pour le moment, ça irait mieux dans cinq minutes, le temps qu'il réorganise tout ce qui venait d'être dit et qu'il le sépare de ce qui avait été pensé.

Attends... HEIN ? Raté les cours pendant trois jours ?!! Déjà qu'il venait de se faire exclure une semaine parce qu'il avait fait sauter la véranda... - au sens propre du terme - ... il retournait un jour en cours et voilà qu'il devait faire péter ? Ouch, il allait encore se faire passer un savon. Enfin, il était plus à ça près.

Se massant les tempes, il se releva et retourna fouiner dans son placard pour s'enfiler deux nouveaux comprimés. Ce n'était pas très indiqué, mais il sentait qu'il allait en avoir besoin...
Les trois prochains jours n'allaient pas être une sinécure.