Des bruits tapant sur ma fenêtre, des portes qui claquent, une légère brise frigorifiant mon être. Voilà les méfaits d'oublier de fermer la fenêtre de sa chambre avant de s'endormir. Ouvrant mes yeux, me réfugiant dans ma couverture, je n'avais pas vraiment la motivation de me lever. Le vent s'était levé, il ne faisait pas vraiment beau. Mes volets clapotaient sur le rebord de la fenêtre, et les courants d'airs ouvraient et claquaient ma porte à répétition. Bien que la flemme de me bouger était là avec toute sa superbe, je ne pus résister à ce boucan plus longtemps. D'un élan de courage, je me levais, bloquant mes volets, fermant la fenêtre, le tout très rapidement pour pouvoir retomber dans mon lit tel un cadavre. Las, nonchalant, le fait d'avoir bougé m'empêcha totalement de me rendormir. Pourtant, je n'avais toujours pas vraiment envie de bouger de là. Oui c'était ce genre de matin, ces matins où vous avez juste envie de rien foutre. Je m'adossais contre le mur, prenant ma couverture pour recouvrir mes jambes. Installé confortablement, je roulais un de ses fameux tubes remplit de drogue qui étaient si parfaits lors de ces matinées lassantes.

Je pouvais donc fumer, mélangeant mon être avec les effets de cette dernière. Lançant un peu de musique, je me laissais porter par la mélodie. Défoncé, totalement emporté dans mon monde, je dus mettre quelques minutes avant de remarquer ce qu'il se passait. Alors que j'ouvrais les yeux, d'une manière anodine, je vis un spectacle qui me marqua. Une chose que je venais de vivre et qui semblait être une des réponses à toutes mes questions. Mes mains, oui, les mêmes qui ne font que de voler, de reproduire dans un but peu légal. Les mêmes qui ne m'ont jamais montrées autre chose que l'illégalité. Ces mêmes là en train de jouer, reproduisant les notes de musiques, la mélodie du piano tournait et mes mains jouaient dans le vide. Il fallait que je vérifie. Et c'était vraiment arrivé. Ce jour là, je m'en souviens. J'avais rassemblé mes affaires, et je m'étais rendu dans un magasin d'instruments. Priant de me laisser essayer pour que je puisse m'y faire. Mettant mes écouteurs, fermant les yeux, laissant mes mains faire le reste du travail. C'était splendide, mes mains ne pensaient plus à faire quoique ce soit d'illégale. Elles se contentaient de jouer, mes poils se hérissaient, mon corps entier frissonnait, la sensation de jouer était splendide.

J'avais acheté un piano ce jour là, j'avais finis par dédié une salle dans mon loft aux instruments de musique. J'étais capable de tout jouer tant que j'écoutais avant. Parfois, dans une transe impossible, il m'arrivait même d'assembler des parties pour créer une nouvelle partition. La musique fut une passion lors d'un long instant. Mais qui me passa, malheureusement. Bien que j'en étais obsédé, mes mains, elles, prenaient plaisir mais moi que l'adrénaline que je pouvais avoir lors de mes grands casses. Les années défilaient, et je m'en éloignais. Devenu un passe temps plus qu'une réelle vocation, je désespérais parfois à ne pas y être rester. Néanmoins, cette révélation m'apprit une chose, ce pouvoir qui échappait tant de fois à mon contrôle avait une possibilité de s'arranger. Peut être qu'elles étaient simplement douées, ou bien, que la musique était simplement compris dans ce qu'elles savaient faire. Après tout, c'était un art comme la peinture, la sculpture. J'étais un peu paumé au début mais plus le temps passait, plus je n'y faisais même plus attention. Ainsi était partit ma voie, mon chemin, ma propre existence.

Les rayons lumineux du jour parcouraient l'ensemble de ma chambre. La légère brise matinale fit frissonner ma peau. Je me réveillais, fermant ma fenêtre, et me préparant pour une e ses autres journées dont je ne savais pas vraiment comment les occuper. Je ne faisais des gros coups que tous les cinq ans, parfois un peu plus, mais c'était à peu près une moyenne pour pouvoir plaider la prescription. Oui et n'être jugé que pour un crime. Enfin bref, mes journées se ressemblaient toutes. Cette journée n'en était pas l'exception, la matinée, vide, se remplit avec un peu d'ordinateur, de télévision, de glande. Je voulais briser mes journées fades. Je sortis faire un tour dans Birdsall. Parcourant les rues, je me retrouvais dans son parc. Me baladant, sans aucune conviction de faire quelque chose de spécial, le destin peut être m'affronta un nouveauté. Je passais devant un banc où résidait une jeune demoiselle. Cette dernière, emportée dans son monde chantait à haute voix. Faisant abstraction de toute vie autour d'elle, elle chantait, prenant autant de plaisir qu'elle le pouvait. Je connaissais cette chanson, je retombais dans une de mes plus ferventes passions, la musique. Bon Iver, Skinny Love, une chanson splendide. Je ne pouvais pas la laisser comme ça, et juste passer mon chemin. Je me précipitais vers le premier guitariste dans le parc, et pour cause, il y en avait beaucoup. Lâchant une liasse de billets, large suffisante pour son compte, prenant la guitare, et retournant vers cette chanteuse amatrice. Je jouais en acoustique évidemment, suivant son rythme et sa voix délicate. Une fois la musique terminée, je lui enlevais un écouteur.

« David Jackson. Professeur de musique en devenir, voulez vous chanter pour moi ? »

D'un air sérieux, je voyais là l'occasion de me repentir un peu, d'occuper ma vie en attendant l'envie inébranlable d'un casse gigantesque. Pour le moment, ce qui m'importait, c'était elle, sa voix, et la musique.

David Jackson était donc un hétéroclite de la musique. Jouant de tout simplement pour le bonheur des oreilles, il faisait passer ses sentiments et ses ressentit de la meilleure façon qui soit : la musique. Il avait toujours souhaité percer dans la musique, malheureusement, l'occasion ne se présenta jamais. C'était aussi parce qu'il n'existait pas réellement, mais bon. Il était doué dans plusieurs instruments, ses mains étaient talentueuses. Il était fan du grand Emmet Ray, de son histoire, de sa passion se contredisant avec toute sa personne. Spécial et totalement dans son monde il ne vivait que pour la musique. David était jeune et célibataire, libre comme l'air il n'avait simplement jamais trouvé personne qu'il aimerait plus que les mélodies. Amoureux transit de jazz, il n'avait pas réellement d'autres préférences, même s'il écoutait de tout. Par chance, alors qu'il essayait de se lancer dans les cours de chant, cherchant une voix pour accompagner ses chansons, il tombait sur Alenor. Et là commence vraiment l'histoire de cet homme.

Je venais donc d'établir une ligne de vie de cet nouvel être. Comme à une naissance je lui avais donné un nom, puis de mon imagination je l'avais imaginé vivre jusqu'à cet instant précis. Ce moment où il prenait une existence réelle. A tout hasard, se baladant toujours avec sa guitare sur lui, le voilà dans ce parc, à Birdsall. J'étais plutôt content de ce personnage qui semblait être amusant. Me mélangeant totalement à lui il me fallait désormais être prudent. J'avais l'habitude d'avoir des dizaines d'identités et vies différentes, j'étais devenu doué presque. Ne connaissant pas grand monde au milieu de cette nouvelle ville, je ne prenais aucun risque. C'était mon hobby à moi, mais cette fois c'était encore plus que ça, un retour aux sources, à la musique, à quelque chose de légal. En quelque sorte.

Je venais donc d'enlever l'écouteur de cette jeune adolescente qui chantait sur son banc, tranquille. Interrompant sa journée en y amenant quelque chose de particulier, je me plaçais comme le petit plus qui allait, sans doute, égayer son après-midi. Planifiant sur le long terme, tout était orchestré pour ma réussite. Plus longtemps j'occupais mes mains çà jouer de la musique, plus longtemps je m'éloignais de l'illégalité. Un tel revirement était simplement une addition de mauvaise passe, une motivation au plus bas, j'avais besoin de nouveauté dans ma routine. C'était parfait, et adéquat.

A ma grande surprise, elle accepta directement l'offre. Profitant du choc surprenant, j'aurais imaginé que cela soit plus difficile pour la convaincre. Mais finalement non, elle accepta et se présenta sous le jolie prénom d'Alenor. Bien que cela me soit familier, je ne retenais pas spécialement, sans chercher une correspondance quelconque. Souriant, soufflant un peu, mine de soulagement je palliais sa réponse d'une petite remarque.

" J'ai eu peur d'être trop abrupte, me voilà soulagé ! "

Jouant le garçon amical et presque timide, je souriais souvent montrant ma bonne foi. Déposant ma guitare contre le rebord du banc avant de prendre place à côté de la jeune fille. Elle posa une question m'intriguant. Levant un sourcil, je revenais à ma sensation familière d'il y a quelques secondes. N'arrivant pas à me souvenir de quelque chose de concret, je m'échappais de cette situation en attisant sa curiosité sur autre chose, et en lui donnant de quoi réfléchir, après tout, qui voit réellement le visage d'un artiste sur scène ?

" Peut être sur scène ? Il m'est arrivé de jouer et de chanter dans quelques endroits ! "

Riant légèrement pour cacher une fausse modestie, j'écartais, dans le doute, une possible rencontre passée où j'aurais pu être n'importe qui d'autre que ce David Jackson. C'était parfois un manque de chance, tomber sur quelqu'un que j'avais déjà arnaqué pour mon propre intérêt. J'arrivais souvent à m'en sortir, en tout cas c'était le cas pour le moment, mais je me doutais bien qu'un jour cela ne se passera pas aussi bien. Frottant légèrement ma barbe en collier, je souriais à la jeune demoiselle. Tout le monde savait qu'une personne souriante et sûr d'elle même ne pouvait être en réalité un menteur, manipulateur sans aucun remord. Cela ne se voyait que dans les films, pas dans la vie de tous les jours. Et pourtant.

" Tu chantes vraiment bien tu sais. Tu as déjà pris des cours ? "

Lançant un autre sujet, il n'y avait que la flatterie pour esquiver une sensation de déjà vu. Ou bien l'emportement, mais ce n'était pas adéquat ici. En flattant son ego, elle serait obligatoirement concentrée sur mon avis de spécialiste et elle partirait vite de cette impression familière. En l'écartant rapidement et définitivement, je pouvais de mon côté chercher où je la connaissais. Enfin, si c'était bien le cas. Mais qui sait, nous n'étions jamais trop prudent dans ce genre de magouilles, pas vrai ?