Back to the business

Josh avait pris l'habitude de se remémorer le passé proche et d'en faire un résumé lorsqu'il n'avait rien d'autre a faire. En l’occurrence, et au vu de la nature de ce passé, c'était plutôt judicieux comme idée. C'était donc ce qu'il faisait, assis a la place 57 de la voiture 6 du train chargé de la ligne Londres-Birsdall tout en sirotant un soda acheté un peu plus tôt à un distributeur. Assez mauvais le soda d'ailleurs.

*Bon... récapitulons. Je l'ai tué, pan, mourue. Ok. Ensuite j'ai été condamné, bon la aussi c'est plutôt logique. Le hic c'est cette fille. Déjà elle doit être (ou représenter quelqu'un qui est) sacrement influent. Le genre qui ne s’embarrasse pas avec les autorités. Et maintenant je travaille pour elle. Donc: Du tact. Avant tout faire preuve de tact. Et aussi, obtenir des renseignements.*

La diplomatie et l'information. Ces deux armes ont sauvé plus de fois la peau de Josh que n'importe quel flingue. Et fort heureusement il savait manier ces armes.

"Excusez moi. Je vous suis reconnaissant pour le...service que vous m'avez rendu, bien sur. Cela dit... Je vous ai entendu mentionner les "Killers of Shadow". Du coup je voulais vous demander... Qui êtes vous ? Qui sont les "Killers of Shadow" ? Et pourquoi nous dirigeons nous vers...

Il marqua une pause le temps de ce souvenir de la ville en question.

"Birsdall c'est ça."

Parfois avoir trop d'informations pouvait également se reveler dangereux. Et travailler pour des sales types n'était pas un problème. Mais Josh ne voulait pas être un simple outil.

"Et...pourquoi m'avez vous choisi ? Je veux dire...je n'ai commis que deux meurtres, dont un par légitime défense... Des meurtriers plus intéressants que moi ça doit pas manquer."

En toute honnêteté, il n'avait pas bon espoir d'obtenir des réponses a cette dernière question. Mais ça valait le coup d'essayer. Il décida qu'il n'avait pas suffisamment été lèche-bottes et qu'une phrase en plus ne pouvait pas faire de mal.

"Je sais que vous préférez probablement rester plus ou moins discrets, et je le comprends parfaitement. Mais vous comprendrez également que j'aimerais bien savoir dans quoi je m'engage."

Et durant toute cette ébauche de dialogue, il ne regarda pas une fois la poitrine opulente de son employeur, signe de bonne foi s'il en est.

❝ L'enfer est pavé de bonnes intentions. ❞

Cela te caractérise si bien mon ange. Monstre. Tu les sauves pour qu'ils te servent, tu les conduis à leur pertes, mais une perte un temps soit peu plus agréable, ou du moins plus digne, et ils te remercient. Le sourire jusqu'aux oreilles. Ils te respectent. Ils te craignent. Ça te fait rire ? Ça ne se voit pas sur ton visage mais dieu que ça te fait rire. Tous plus pitoyable les uns que les autres. Il n'y en a qu'un qui sort du lot. Deux en fait. Mais ils t'ont abandonnés. L'un. Après. L'autre.

Assise dans le train qui menait à Rédemption, le visage caché par un livre d'une épaisseur déstabilisante, tu n'es pourtant pas en train de lire, n'est-ce pas ? Tu penses. Tu te rappelles. Tu te rappelles des jours de pluie lorsque tu étais enfant ? Tout cela n'est qu'un leurre. Un leurre de ton humanité perdue. A présent ce qui compte, tout ce qui compte est de mener la mission à bien. A toi de jouer, c'est de ta responsabilité. Ce trajet, tu le fais de plus en plus, afin d'aller chercher les derniers recrues de ta mission.

L'homme que tu ramènes cette fois est plus âgé que toi. Pourtant... Cela n'importe pas. Cela n'importe plus. Tu as acquis le détachement et la maturité nécessaire. Sur l'échiquier tu es la reine. A Rédemption tu seras la destructrice. Ton esprit est tellement vide qu'on y entendrait la brise marine souffler, ou plutôt celle qui court sur un grand pré d'herbe et de fleur. Cette image est sans doute tout ce qu'il te reste. De l'innocence que tu pouvais avoir. Tout ce qui n'est pas taché de sang. Après une longue inspiration, tu finis par baisser le livre et le poser sur tes genoux, sans le regarder tu sors le dossier portant son nom, et tu commences à feuilleter en silence. Les ordres...

Les ordres, c'est toi qui les donne. Pas de supérieur. Ils te font confiance ? Sincèrement ? Tu en doutes. Ils te laissent cette immense marge de manœuvre car ils savent que tu es une femme d'honneur. Ils ont tellement tort. Tu es justement la sorcière. Perfide, vile, sournoise, qui tuerait père et mère pour... Peut-être pas. Tu n'en sais rien. Le dossier stipule d'une façon assez vague « Don pour attirer la pitié d'autrui ». Même si tu restes septique, tu finis par fermer calmement les pages sur sa photographie, avant de relever les yeux. Vers lui. Et de plonger son regard dans le sien. Sa tonne de question pourrait t'assomer, mais tu as l'habitude, tu n'es pas professeur pour rien, d'un côté.

« Votre dossier a été étudié en détail avant que nous fassions notre choix. Si vous avez été choisi, c'est que vous remplissez toutes les conditions requises à ce travail. »

Tu restes vague, toi aussi. Tu parles de « nous », c'est une habitude. Tu sais tout le fond de l'organisation, ça devrait te terrifier. Ce n'est pas le cas. Ça t'amuse au contraire. Et puis, on sent que le discours a été maintes et maintes fois répété, pas pour une prononciation parfaite, mais pour chaque nouveau membre. Cependant, en te redressant, tu poses tes mains sur le dossier et finit par reprendre.

« Vous n'avez pas été choisi au hasard parmi des milliers de dossier. Parmi des milliers de meurtriers. C'est plus que ça. Et effectivement, nous nous devons de garder un silence de mort sur le sujet de l'organisation. Tout ce que vous devez savoir, c'est qu'à présent vous ne pouvez plus faire machine arrière. »

Toujours froide et distante, tu finis par le lâcher du regard pour observer l'horizon. Et si on pouvait faire machine arrière ? Et si tu pouvait t'enfuir de cette réalité ? Et si tu pouvais retrouver enfin ce que tu cherches ? Et si... Mais c'est stupide. Pourquoi quitter un monde qui finira par nous appartenir ?

Déçu, mais finalement assez peu étonné de cette réponse, Josh se détendit. Il posa ses mains derrière son crane, et réprima une envie de poser ses pieds sur la table minuscule a disposition. Il se serait bien laissé aller à ses rêveries, plus que douteuses moralement parlant, vous pouvez l'imaginer, mais quelque chose le dérangeait dans l'attitude de... elle s'appelait comment déja?

"Excusez moi...vous ne m'avez pas donné votre nom... Ou votre nom de code peut être? Enfin, quelque chose qui puisse me permettre de vous désigner."

Liah... Assez inhabituel, mais simple et élégant. A défaut du reste, Josh aimerait son prénom. Donc, quelque chose le perturbait à propos de Liah. Ce n’était pas son apparence, elle paraissait peut être un peu froide... Bon peut être pas qu'un peu. Mais elle gardait tout de même une élégance certaine. Non, tout était dans son attitude. Et la nature de son discours. Pas vraiment ce qu'elle lui avait dit, mais plutôt la façon qu'elle avait eu de le dire. Pas de "navrée" de "désolée", pas un regret ne se ressentait dans le ton de sa voix, elle restait absolument impassible. Et bizarrement cela dérangeait Josh. C'est vrai, jusqu'a maintenant tout le monde lui prétait toujours un minimum d'attention. Enfin... peut être. Peut être que des gens n'en avait rien a foutre de lui sans qu'il ne l'ai vraiment remarqué. Peut être était il un peu parano, et voyait de la pitié partout? Cette question resta en suspens. Elle restait toujours en suspens. Il décida alors de changer de sujet.

"Et euh... en quoi consistera mon...travail ?"

Il avait arrêté de mettre les mots entre guillemets. C’était assez peu discret, et probablement ridicule. Il s'engueula mentalement aussi. Il était trop curieux, c’était jamais une bonne idée. Et puis l'idée initiale était d'engager la conversation, c'était un peu moyen comme méthode. Comme à son habitude Liah répondit simplement et sans qu'aucun sentiment ne se ressente dans sa voix. Josh soupira. D'un autre coté c'est vrai qu'ils ne pouvaient pas être familiers. Chacun devait prendre l'autre au sérieux. Sauf que l'un risquait de très gros ennuis a la première bourde. Il jeta un oeil a travers la vitre du wagon. Des champs a pertes de vue. Même les vaches avaient l'air de de demander ce qu'elles faisaient la. Ce village... Bris... Non,Birsdall devait vraiment être paumé. Et comme pour répondre a ses pensées le train s'arretait.

"On est arrivé...mais on est en pleine campagne !"

Remarque idiote. Un batiment se montra tout de même la gare. Calmement Liah prit son dossier et se leva. Josh n'eut pas d'autre choix que de l'imiter.

❝ L'autre n'est que l'outil d'une vengeance muette. ❞

Le sourire qui nait sur tes lèvres n'est en rien un bon signe. Quelqu'un qui te connaîtrait un minimum saurait déceler le danger qui t'envellope. Les questions s'accumule, tu n'es déjà plus là. Tu te souviens de ce monde taché de sang, de ces pierres souillées, de ces corps vidés. Et tu souris, calmement, simplement. Ta définition du bonheur est sans doute bien plus loin que ce que les gens prétendent pour eux. Tout le monde veut le pouvoir. L'amour est une faiblesse. Le tout est de s'éloigner de tout pour régner en maître, sans aucun point faible. C'est ce que tu veux faire ? Dis moi, Mon Ange, c'est donc cela ton plan ? Tous les écraser. Et finir par rire de leur malheur. Debout, tu le stoppes cependant dans sa course, faisant signe à l'homme dans le couloir qui répond d'un vague hochement de tête. Tout ici t'appartient. Et pour ce qui n'est pas encore à toi, il s'agit uniquement d'une question de temps. Tu fermes la portes de la cabine et t'appuies contre celle ci pour observer ton ainé. C'est amusant. Non ?

« Votre travail consistera à récolter un maximum d'informations quant au centre Rédemption, à ses élèves et à son directeur. Cependant, ne voyez pas cela comme un travail facile. Beaucoup risquent de vous blesser, voire plus. »

Tu arrêtes ta phrase d'une façon un tantinet tranchant, mais ça n'a rien d'inhabituel venant de toi. Et puis tu te mets à le regarder, comme si tu pouvais lire son âme, comme s'il ne pouvait te cacher aucun secret. Tu te fiches de tout savoir, à part si cela est dans l'unique but de contrôler. On t'a déjà dit que tu étais un chouilla mégalomane ? Et pourtant tu as raison, ces pauvres pions ne valent rien. Puis tu prends un air plus doux, même si la dureté de ton âme se lit toujours dans tes yeux.

« Vous devez savoir que ces élèves ont des capacités hors du commun. Tout comme vous, Josh. »

Mettre en valeur le sujet. C'est comme si tu faisais une expérience à très grande échelle. Un jour, tu devrais essayer de répandre un agent chimique mortel pour les humains et de te transformer en insecte. Je te donnes des idées. Ah ? Tu y avais déjà pensé ? Mince. Toujours est-il qu'après quelques seconde à lui lancer un regard très appuyé, tu finis par soupirer et prendre une attitude plus détendue, tu passes en mode professeur, pas en mode Killer...

« Rasseyez vous, il nous faut encore clarifier quelques points pour que vous puissiez commencer. »

Le temps coule, coule, coule entre tes doigts et tu n'y peux rien. Que faire alors ? Pour rattraper ce temps passer ? Un jour tu le sauras, en attendant tu cherches, tu fais les choses vite et efficacement, depuis le début, depuis que tu bosses pour eux, ou peut-être est-ce eux qui bossent pour toi ? Personne n'en sait rien. Et c'est bien mieux comme ça.

Toujours silencieuse. Enfin, la situation était particulière, mais d'habitude Josh n'était pas extraordinairement bavard non plus. Voyant que ses questions restaient de toute manière sans réponses, il décida de devenir à son tour silencieux. A la place il observait le décor qui l'entourait. Un village paumé. Quelques maisons, personne dans les rues. Rien de bien spécial. Le tout était un peu glauque. La météo devait jouer aussi.

*Merde, pourquoi mon coeur bat si vite? Faut toujours que je sois stressé pour rien. Bon, certes, tu sais pas trop ce qu'il va advenir de toi, et c'est relativement inquiétant. Mais garder ton calme c'est la meilleur option que t'ai.*

Réfléchir, c’était le meilleur anti stress qu'il pouvait trouver. Pourquoi l'avait on amené ici? La meilleure option qu'il trouvait c'était l’élimination d'un témoin écarté de la société. Pourquoi lui?

* Parce qu’on peut se débarrasser de moi sans problèmes...*

Au moins il avait de bonnes raisons d'être stressé. On pouvait voir les choses comme ça. Josh ne voyait pas les choses comme ça. Sa paranoia fut stoppée net. On lui parlait.

« Votre travail consistera à récolter un maximum d'informations quant au centre Rédemption, à ses élèves et à son directeur.

Déja il s'imaginait observer les jeunes filles a la sortie de l'école tel le pervers moyen. Il ne s'attendais pas du tout a ça. Pas du tout. Mais de toute evidence son travail devait être d'une autre nature. Il fallait l'esperer.

Cependant, ne voyez pas cela comme un travail facile. Beaucoup risquent de vous blesser, voire plus. »

la phrase lui échappa. Les mauvaises phrases lui échappait toujours au mauvais moment.

"Des...gosses?"

Mais son interlocutrice resta imperturbable.

« Vous devez savoir que ces élèves ont des capacités hors du commun. Tout comme vous, Josh. »

C’était une blague? Josh s'abstint tout de même de rire. Il se répéta la phrase dans sa tête. Des capacités hors du commun? Et vu le ton qu'elle avait employé, c’était plus sérieux que lécher son coude.

"Pardon?"

« Rasseyez vous, il nous faut encore clarifier quelques points pour que vous puissiez commencer. »

Josh soupira, la journée prometait d'être longue.

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