Jamais seule [Joanna Monroe feat Eleonore Lloyd]

"Je sais. Je sais et cela me tue.
A chaque fois, un nouveau coup dans le coeur. Ils sont horribles. Et je suis la seule à voir cela. Tel est mon fardeau.
Pourquoi ne peuvent-ils pas changer ? Mériter mon amour ? Chaque fois, j'espère trouver le bon en eux. S'il y en a, et c'est bien trop rare, il est noyé dans leurs erreurs. On dirait qu'ils font exprès d'être si médiocres !
S'ils pouvaient se voir, comme moi je les vois...Ils auraient honte. Et peur.
J'espère que l'Enfer existe. Car ils méritent tous d'y aller."
Pense-t-elle, recroquevillée sur elle-même, l'eau brûlante tombant et ruisselant sur sa peau, couvrant ses larmes.
L'Enfer, Eleonore y est déjà.

*..*..*..*

Oscillant constamment entre une rage froide et bouillonnante et le plus simple et profond désespoir. Perdu dans ce monde où rien n'est parfait, ou tout est décevant. Eleonore supporte avec peine, avec une grande peine, le poids de son pouvoir.
Aujourd'hui c'est la rage qui l'emporte. La haine de tous les êtres humains. Le dédain à l'égard de tous ceux qu'elle croise, qu'ils soient foncièrement mauvais, ou tout simplement pathétiques.
Une rage telle, que même la perspective de passer une heure seule (enfin !) si tôt un samedi matin, ne peut l'atténuer.
Pourtant, depuis son arrivée à Rédemption deux semaines auparavant, c'est tout ce dont elle rêve. Un moment seule. Quelques minutes sans avoir à contempler l'immense erreur de l'évolution qu'est l'humanité.

*..*..*..*

"Je ne veux pas faire équipe avec lui."
Il a suffit de ces mots, d'un regard incendiaire et de sa détermination sans faille pour en arriver là.
"Une heure de retenue. Samedi matin." a proclamé d'un ton autoritaire son professeur de biologie. Fier de lui. Convaincu de donner une bonne leçon à cet gosse de riche qui n'a jamais connu le refus.
Si seulement il savait. Tout ce qu'elle sait sur lui, avait pensé Eleonore en réprimant son envie de tout lui raconter. Tout ce qu'elle a vu de son âme tachée par la médiocrité, et une tristesse grise, dégoulinante de pitié. Elle a vu de lui, n'ayant pas essayé de percer ses noirs secrets (elle a mieux à faire), mais c'est pourtant bien assez pour lui faire perdre tout crédibilité.
La peur farouche qu'il a de sa mère. Son sentiment d'être meilleur qu'elle car il vient d'une famille pauvre, et a du se battre pour arriver où il est. La haine pour son frère, le chouchou des parents. Sa femme, créature insipide qu'il hait, mais ne peut se résoudre à quitter.
Quel homme pathétique...

*..*..*..*

Ainsi, Eleonore se retrouve en salle de colle, un samedi matin. Savourant une solitude salvatrice, qu'elle attendait depuis des jours.
Enfin seule !

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