Cela faisait quelques mois que j’étais à Rédemption et je m’y plaisais bien. Malgré que la vie n’y était pas toujours rose, que parfois c’était même plutôt sombre… Je ne faisais pas vraiment attention, je vivais ma petite vie tranquillement. Rapidement après mon arrivée, je m’étais inscrite au groupe de journalisme. Ça me permettait de m’intégrer et puis j’aimais écrire, donc c’était l’endroit parfait pour moi. Je m’étais pas trop mal intégrée, et après avoir fait mes preuves, j’avais pu écrire deux ou trois papiers sympas. Bon c’était pas toujours passionnant, mais on riait bien. Aujourd’hui, j’avais une interview… j’avais hâte parce que c’était la première fois que j’en faisais un. Je trouvais ça vraiment fun et puis depuis quelques temps je me disais que ça serait un métier chouette pour plus tard. Mais bon, pour ça, je verrais plus tard… de toute façon je changeais souvent d’idées. En fait, je n’en avais aucune idée. Mais bon, j’avais l’avantage de pouvoir retourner très facilement dans le monde extérieur, mon pouvoir ne pouvant pas créer de problèmes s’il n’était pas maîtrisé… de toute façon, je ne l’avais jamais maîtrisé, tout se faisait tout seul. Je n’avais qu’un seul pouvoir et aucun effort à faire pour qu’il fonctionne. Mais bon, je préférais cela plutôt que d’être un risque potentiel.

Il était encore tôt le matin, j’étais debout dans ma chambre en train de réfléchir à ce que je pouvais bien mettre pour cette journée et surtout ce premier interview. Oui, j’étais superficielle et je l’assumais. Je choisis un joli jeans ajusté et taille basse et une blouse de satin blanc assez ample, un peu bouffante car parfaitement ajustée à la taille, je laissais le premier bouton ouvert afin d’avoir quand même un petit décolleté. Une ankh autour du cou, des boucles d’oreille pendante et un bracelet en argent et le tour était joué. Il restait le passage maquillage et puis j’étais parée pour une journée de cours. Après être sortie de la salle de bain, j’allai prendre un bon petit-déjeuner puis allait en cours. J’avais hâte à midi, j’avais rendez-vous à midi et demi dans la salle de musique avec un certain Samaël Balsey pour qu’il me parle du club de musique et de lui-même. Je ne suivais pas trop les cours, écrivant plutôt une liste de questions potentielles à lui poser, au cas où c’est un homme pas bavard. Mieux valait être prête à toutes éventualités! A midi, la cloche sonnait pour le début de la pause, on avait près de deux heures. J’allais vite me chercher un sandwich que je mangeais en route pour la salle de musique. J’étais la première arrivée avec près de 10 minutes d’avance. Je m’installai sur une des chaises, je préparai mon enregistreur, mon bloc note et mon stylo. J’étais parée à commencer… enfin, il me manquait juste l’interviewé.

J’observai la pièce et commença à prendre des notes sur ce qui m’entourait, ça me permettrait de me remettre dans l’ambiance quand j’écrirais mon papier. Je prenais cette activité extra-scolaire très au sérieux. J’avais également pris un appareil photo pour pourvoir immortalisé Samaël pour le journal. Je me demandais à quoi il ressemblait aussi, je l’avais sûrement déjà vu, mais impossible de mettre un visage sur son prénom. J’espérai qu’il soit mignon… C’était toujours plus agréable de passer du temps avec un beau gosse à regarder. Je verrais! De toute façon, je n’étais pas vraiment là pour ça. Je me mis à rêvasser, le stylo entre mes lèvres. Sursautant lorsque la porte s’ouvrit, je me tournai vers le nouvel arrivant tout sourire.

Samaël? Je suis Camellya, enchantée.

Je lui tendis ma main et le détaillai légèrement du regard en attendant. J’étais plutôt bien tombée, il était charmant.

J’avais sursauté en entendant la porte s’ouvrir. Perdue dans mes pensées, je n’avais pas vraiment réagi que le temps passait et puis hop, il était l’heure de mon rendez-vous. J’avais eu le temps de jeter un coup d’œil à ma montre qui me confirmait qu’il était parfaitement à l’heure et j’en étais ravie. Je lui tendis la main en le saluant et voilà qu’il grimaçait déjà, enfin… perdait du moins son beau sourire. Est-ce que c’était le fait que je l’avais appelé de son non complet, Samaël qui l’avait tiqué? Je crois bien que oui. La suite me confirma que cela devait être cela. Je ne pouvais en être sûre, mais c’était mon avis. On verrait bien, j’aurais peut-être plus de détails durant notre temps de discussion.

Enchanté, mais appelle-moi Sam.

Je hochai la tête tandis qu’il me serrait la main puis déposait ses affaires sur le sol près de la chaise la plus proche de celle que j’avais choisie. Il s’y assit et je m’installai en face de lui. Je prends mon magnéto entre mes doigts. Il me regardait, je sentais son regard sur moi. C’était amusant. Je le regardais également, le détaillant pas hyper discrètement… Je n’avais jamais été discrète, c’était pas mon genre. J’aimais être directe, je n’allais pas changer mes habitudes, même si parfois je me dis que ça serait mieux. Je ne pouvais pas changer, j’avais toujours été directe et j’aimais ça. Ça me faisait toujours rire de voir les gens mal à l’aise. J’étais un peu garce et c’était toujours amusant.

Alors, tu veux commencer par quoi?

Son ton était joyeux, il me donna le sourire et me motiva à commencer ce petit interview. Je posai mon petit magnétophone devant moi et pris mon stylo. J’appuyai sur le bouton pour allumer l’appareil. J’enregistrai toujours tout, enfin… presque tout. J’aimais pouvoir écouter à nouveau tout ce qui se passait. Je gardais de très nombreuses petites cassettes dans ma chambre ainsi que les photographies. Les souvenirs de chaque jour étaient importants. J’ai commencé ces collections étranges peu de temps après mon installation en Angleterre, lorsque je trouvai un petit magnétophone chez ma tante et qu’elle me l’offrit. Heureuse, j’enregistrais à chaque fois que j’entendais quelque chose d’intéressant, d’étonnant. Au début, il m’arrivait d’enregistrer des choses à l’insu des gens, il m’arrivait encore de le faire… mais principalement des bruits de fonds, des musiques de la vie quotidienne.

Je peux enregistrer l’entrevue?

Je lui souris doucement. Certes, j’ai allumé l’appareil, mais je pourrais toujours l’éteindre si cela le dérangeait. Je sortis le calepin sur lequel j’avais écrit le suivi de l’entrevue que j’allais mener. Feuilletant quelques pages, je relevai ensuite les yeux sur lui, me concentrant à nouveau sur son beau visage.

J’ai quelques questions de base à te poser avant de commencer la partie musique… J’aimerais savoir depuis combien de temps tu es à Rédemption, si tu t’y plais et puis quel est ton don?

Je ris doucement, oh oui je suis curieuse! Et il n’a encore rien vu, il n’y avait aucun doute là-dessus. Et puis, j’étais aussi super bavarde, enfin la majorité du temps. Je gardai une main sur mon magnéto attendant de savoir si je devais le fermer ou si je pouvais enregistrer sa voix. La majorité des gens détestait se réentendre… mais c’était uniquement pour mon usage personnel. Il y a certaines cassettes que je réécoutais et qui m’apaisait, mais c’était toujours des bruits de fond, ou des bruits de la nature.

Il avait l’air d’assez bonne humeur, donc ça allait certainement bien se passer, sauf si je le choquais avec une question… mais bon, je restais positive. J’étais direct, mais là je travaillais, fallait-il que je devienne un peu plus diplomate? Certainement que oui, le problème? Je n’avais jamais été douée pour l’être et comme un professeur me la dit un jour, "Vous apprendrez à mettre de l'eau dans votre vin en vieillissant, mademoiselle."! J'avais trouvé cette phrase bien bateau, mais on me l'a répétée à de nombreuses reprises, pas sous la même forme, mais le même sens. Bref, je m'en fichais un peu à vrai dire, j'aimais comme j'étais et je n'avais aucune envie de changer pour le moment. J'étais insolente? Et après? C'est une des choses qui faisait tout mon charme. Je ferais peut-être l'effort d'être agréable aujourd'hui, pas que je le sois pas habituellement… avec un beau mec, je pouvais toujours faire un effort? En fait, pas vraiment. Je n'allais pas faire exprès d'être une chieuse, mais il ne fallait pas non plus trop pousser.

Bref, revenons-en à nos moutons. J'avais attaqué assez vite directement, droit au but! J'avais fait ma fine en lui demandant si cela ne le dérangeait pas, ce qu'il me confirma assez vite en haussant les épaules. Parfait! J'aurais été bien moins efficace dans l'écriture de l'article s'il n'avait pas voulu et j'aurais été hautement agacée. Relevant les yeux sur lui, je le vis sourire, c'était un petit sourire, j'avais même eu l'impression que c'en était un charmeur. Mais bon, mon imagination était capable de s'emballer pour un rien… Il m'écouta puis répondit assez rapidement. Mon stylo en main, je commença directement à prendre des notes, quelques-unes sur ses réponses, même si j'avais le magnétophone, mais surtout sur l'ambiance et ses réactions.

Depuis trois ans maintenant et je m'y plaît de plus en plus. Et pour le don peut-être vais-je te le confier, mais seulement à la fin de cette entrevue.

Je relevai un œil sur lui et sourit en coin à la vue de son sourire et son petit air énigmatique. Il réveillait la fouine qui était en moi et je me posai milles et une questions. Je l'observai un instant, le bout de mon crayon entre mes lèvres. Il croisa les bras sur sa poitrine, s'appuya bien au fond de sa chaise et me demandai quelle était la question suivante. Il ne manquait pas d'air lui! Refuser de me répondre dès le début de l'entrevue… Mmh, il me plaisait ce Sam! Il avait réussi à éveiller ma curiosité encore plus que ce qu'elle était déjà… J'allais connaître son pouvoir, je venais de m'en faire la promesse… et cela d'ici la fin de l'entrevue. Il me demanda ensuite quelle était la prochaine question. C'était une très bonne question qu'il me posait là… il allait falloir que je suive le fil de l'entrevue prévue, sans me laisser déconcentrer… enfin oui, un peu quand même! J'aimais bien dévier un peu, et puis, j'étais bavarde. Je ne pouvais rien y faire.

Oh, tu es là depuis plus longtemps que moi, mais j'aime bien cette école, ça change…

Et voilà que je comptais ma vie… C'était pas gagné pour rester concentré! Bon, faut avouer que rester focuser, c'était pas vraiment mon point fort. Ca faisait partie des raisons pour lesquelles j'enregistrai tout… ça me permettait ensuite de trier l'utile du complétement inutile voire même futile!

Bon, je dois t'avouer que c'est mon premier interview… et il paraît que c'est souvent plus facile pour l'interviewé de pouvoir poser des questions également… alors j'te propose plus une conversation qu'un simple question-réponse où je pose ma liste de questions sans plus réfléchir… T'en penses quoi?

Je ne sais plus où j'avais vu ce conseil, mais je l'avais vu sans aucun doute. Peut-être dans une des revues sur le journalisme ou alors un des élèves du club ou encore le professeur responsable. Sincérement, plus aucune idée, mais ça n'avait pas d'importance, si ça pouvait le mettre un peu plus à l'aise, c'était parfait. Je récolterais comme ça sûrement plus de petits détails sur la vie quotidienne de mon sujet. Un sujet… c'est un peu fort comme mot, mais bon je ne le lui dirais sûrement pas comme ça!

Parle-moi un peu de ta musique… l'instrument que tu joues, depuis quand, ce que tu aimes par-dessus tout sur le fait de jouer… Je suis curieuse et puis c'est une belle passion…

Je lui souris doucement, j'espère qu'il va me parler de cela avec la passion dévorante qui anime les artistes. J'aime voir cela chez quelqu'un lorsqu'il parle de ce qui lui plaît le plus, je trouve ça vraiment beau et poignant… ce sont ces gens-là qui sont capables de transmettre le goût et l'amour d'un art.